Je suis entrepreneure et je vis avec un trouble de santé mentale

Publié par Fanny Yockell le

Je suis entrepreneure et je vis avec un trouble de santé mentale. J'ai reçu le diagnostic de trouble d'anxiété généralisée et de trouble panique en 2015. Ce fut un long cheminement pour en arriver à gérer mon quotidien pendant quelques années. Ce printemps, j'ai fait une rechute. J'ai combattu durant plusieurs semaines mes symptômes, je ne voulais pas m'avouer que c'était revenu. Je le voyais comme un échec. « Je ne peux pas me le permettre. Je suis entrepreneure, j'ai une boutique à gérer, c'est impossible. »

J'ai finalement accepté l'aide et j'ai été hospitalisée pendant quelques jours. Être sans écran, seule, encadrée et soutenue a été la meilleure chose qui pouvait m'arriver pour me permettre d'atterrir. À l'hôpital, je me sentais en paix dans mon mal-être. C'était vraiment perturbant, mais confortable à la fois. Je l'ai gentiment surnommé mon hôtel 5 étoiles pour prendre soin de mes démons. J’étais zen et je crois que ce n'est pas juste l'effet de la médication, mais bien aussi un état de lâcher-prise.

À ma sortie, j'ai rapidement voulu reprendre mon rythme de vie d'avant. J'avais honte et je voulais que personne ne sache ce qui s'était passé. Je voulais rapidement retourner à la boutique, comme avant. La vie en a décidé autrement, et heureusement, car mes blessures et schémas que je croyais guéris ont remonté en moi. Et ça, ça ne se règle pas du jour au lendemain, tout comme le processus d’acceptation. Il y a deux mois, jamais je n’aurais pu écrire ces lignes.

J'ai réalisé que j'ai passé la dernière année à être beaucoup dans le faire. Faire de nouveaux projets, faire des choses pour me sentir vivante. Dans tout ça, j'ai complètement oublié de juste être et de prendre soin de moi. Être présente, apprécier ce qui est là, me déposer. La rechute du trouble anxieux m'a obligée à vraiment m'arrêter. Malgré tout, je ne voulais pas l'écouter. J'ai voulu continuer d'être productive et d'accomplir des choses pour masquer ces émotions. Plus j'essayais de contrôler, plus je souffrais. C'est tellement difficile de juste observer et cohabiter avec la souffrance, la tristesse et l’anxiété. Ce sont des émotions que je repousse et que j'ai peur de ressentir. 

J'ai lu ce passage dans un livre de Nicole Bordeleau qui m'a fait beaucoup de bien. "Rappelez-vous que c'est au moment même que vous croyez que tout s'effondre et que vous allez tout perdre, qu'une transformation profonde se met à l'oeuvre. Et grâce à votre persévérance, bientôt, très bientôt, vous découvrirez un nouveau monde." ¹

Depuis juin, je participe à un atelier d'auto-gestion de groupe avec l'organisme Relief qui me permet de réapprendre à me connaître et de parler avec d’autres personnes qui vivent les mêmes problématiques que moi. Pour le reste, je me souhaite simplement d'être indulgente envers moi. De me laisser du temps, de me permettre de dire non et de m’entourer de gens et de projets alignés avec mon coeur. Aussi, je ne veux plus me cacher. Je suis entrepreneure, je vis avec un trouble de santé mentale et je suis certaine que les deux peuvent cohabiter ensemble. 

Je veux prendre le temps de remercier mon amoureux Jean-Philippe qui a su prendre le relais de la boutique avec notre chère Annabelle. Merci de m’avoir permis de me déposer durant cette période achalandée. Merci à mon amie Anne-Marie qui a su détecter mes signaux de détresse et qui m’a guidée au bon endroit. Merci au personnel soignant qui a su m’apaiser avec tellement de bienveillance. Merci à ma famille, mes amies et nos précieux clients de votre patience.

Si vous êtes en détresse, que vous avez besoin d'aide, que vous souhaitez parler à quelqu'un, n'hésitez jamais à contacter ces ressources :

Info-Social 811

1-866-APPELLE

 

¹ Bordeleau, N. (2015). L’Art de se réinventerLes Éditions de l’Homme.

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commentaires


  • Je suis un Bipolaire en Affaire. Je suis médicamenté mais même là , il arrive que j’ai des HIGH suivis nécessairement de DOWN .
    Sur un HIGH j’écris des idées «  folles «  qui ne le sont peut être pas tant . Bon succès !!

    René Lavoie le
  • Juste un mot : merci

    Stefanie le
  • Je te trouve très courageuse de donner ce témoignage. Prends-soin de toi.

    Duyen le
  • Chère Fanny, je me souviens de toi quand j’ai travaillé chez Jean-Coutu à Rimouski au laboratoire pendant quelques mois, tu étais cosméticienne à ce moment. Je me souviens de ton sourire et de ton rire que j’entendais du labos plusieurs fois par semaine, c’était si contagieux. Je te suis depuis ce moment, tu ne te souviens pas de moi, mais moi oui. Je revois cette authenticité que j’ai pu deviner de toi dans chacun des tes textes et de tes publications. Merci pour ce témoignage, ta grande sensibilité fait certainement de toi une grande femme et grande entrepreneure.

    Marie-Michèle le
  • Merci de t’ouvrir pour défaire les tabous! Ça fait du bien de voir qu’on peut être humain, souffrir d’une problématique de santé mentale et accomplir des choses!

    Dodo le
  • Chère Fanny, tu es tellement une belle personne, inspirante, prends soin de toi ! xx

    Chantal Asselin le
  • Bravo pour ta transparence. Ça prend beaucoup de courage. Tu vas certainement aider des gens avec ce texte. Tu es un modèle pour plusieurs jeunes femmes ❤️

    Mélanie le
  • Fanny,
    Du courage, de la conscience, de la force, de la transparence par rapport à toi-même, par rapport aux autres, tu as tout ce qu’il faut pour aller bien plus loin que ton diagnostic. Et aider beaucoup de monde par la même occasion. Je suis très émue par ton texte. 🤩

    Julie le
  • Il n’y a pas de honte à avoir un problème de santé mentale. J’espère que le fait d’en parler publiquement t’aidera toi mais aussi d’autres qui le vivent dans l’ombre. J’ai souffert d’anxiété généralisée et j’en souffre encore. C’est pire à certaines periodes mais ça passe. Tout ce que je peux dire c’est qu’on ne guérit jamais de l’anxiété, on apprend à vivre avec.
    Bonne chance pour la suite

    Caroline le
  • Bravo félicitations.j’ai vécu une semblable expérience il y a quelques années,la perfection au travail a eu raison de moi,avec plus consultations au psychologue,j’ai réussi a m’en sortir,mais c’est à faire attention à tout les jours,j’ai appris à vivre avec,et il n’y pas de honte à en parler… Bonne chance pour la suite,ça va bien aller ☺️ xx

    Alain Emond le

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